Écrit par : Christian Janfils Le : 27 octobre 2023 Catégorie : Conseils & Astuces

On en parle partout et on la présente à toutes les sauces : la transformation digitale. Pour certains, c’est le renouvellement de leur logiciel de gestion (on parle d’ERP[1] ou de gestion commerciale), parfois c’est le passage aux réseaux sociaux ou au marketing digital. Bref, cela part dans tous les sens. De fait, en PME, c’est souvent un épouvantail. La PME est spécialiste de son domaine d’activité, mais généralement pas du digital. Rares sont les PME qui peuvent se targuer d’avoir réussi un projet (de transformation) digital lors de leur premier essai.

Cet article a pour objectif de préciser le sujet de la « transformation digitale », puis de présenter un très bel outil disponible en Wallonie pour se comparer aux autres en matière de digitalisation et, enfin, de proposer quelques pistes de réflexion pour aider un chef d’entreprise non-initié à entamer une réflexion et démarche de digitalisation de tout ou partie de ses processus de gestion.

Qu’est-ce que la transformation digitale d’une PME ?

Le marketing du secteur digital travaille plutôt bien et se renouvelle constamment. Ceci ne facilite pas nécessairement la tâche de notre patron d’entreprise qui voudrait profiter du digital. Pendant plusieurs décennies, le digital était synonyme d’informatisation. Puis, le web est arrivé avec le vocable « digital ». Le web s’est étendu progressivement aux Applications et aux Mobiles, puis aux Réseaux Sociaux. Le secteur n’arrête pas sa créativité, parfois contrainte et forcée (cybersécurité), rendant la tâche des décideurs en entreprise plus complexe encore.

Distinguer plusieurs concepts : dématérialisation, digitalisation et transformation digitale

Dématérialiser est typiquement ce qui se passe en comptabilité. Une facture papier devient une facture PDF (elle est scannée). La reconnaissance optique permet de la « digérer » pour ensuite la porter en compte et ne plus devoir passer manuellement des écritures récurrentes, comme pour une facture de biens et services. La dématérialisation va parfois plus loin, toujours dans le cas de la facture, elle peut passer à une expression informatique de la facture en structurant dans un fichier informatique (typiquement un format appelé XML[1]) la liste des champs attendus pour cette facture et les valeurs spécifiques pour chacune des factures émises par un prestataire.

Digitaliser est différent. Là où dématérialiser ne change pas le processus de gestion (par exemple de l’émission de la facture), digitaliser va consister à remettre en question le processus qui soutient la création du dit document. Ainsi, avant la facture vient d’une offre ou d’un devis, qui fait appel à une catalogue d’articles qui disposent eux-mêmes d’un prix par groupe de client. Revoir tout le processus de vente en digitalisant le catalogue, la gestion des groupes de clients, la tarification par groupe de client ou selon d’autres paramètres (la quantité par exemple), permet de créer des offres ou des ventes comptoir dans un même et unique logiciel. Ce logiciel génère la facture électronique, avec ou sans paiement associé, le tout passant directement en comptabilité sans aucun ré-encodage et, surtout, sans erreur. La facture à proprement parler peut toujours être imprimable dans un format généré (typiquement du PDF) pour être remise au client qui l’exigerait sur place ou qui souhaiterait la recevoir par email ou au format structuré XML. Passer d’une facturation non automatisée à une facture automatisée en liaison au catalogue des articles, à la base de données de clients et à la comptabilité, c’est digitaliser son processus de facturation (et son processus de vente).

Transformer numériquement son organisation, c’est aller encore plus loin. C’est réfléchir à son ou ses métiers, son positionnement compétitif de marché et concevoir, à l’aide des technologies digitales, de nouvelles offres de services, voire s’inventer de nouveaux métiers pour son entreprise.

Chaque patron d’entreprise doit réfléchir au trajet de son entreprise et se positionner en terme de besoins. Nous y reviendrons ci-dessous. De préférence, il faut viser la digitalisation car la dématérialisation constitue a priori une moindre source de gains de productivité.

Où en sont les PME ?

En Wallonie, nous disposons d’un bel outil, le baromètre de l’Agence du Numérique, qui mesure la maturité numérique des entreprises, sur la base d’une analyse multicritères. Annuellement, l’AdN interroge un échantillon représentatif des entreprises en Wallonie pour en déduire un baromètre. Les données 2022 constituent ainsi une référence du paysage des entreprises wallonnes quant à leur maturité numérique.

Chaque patron d’entreprise peut alors décider de se confronter à ces données moyennes, y compris sectorielles, pour vérifier sa propre maturité numérique, versus la moyenne de son secteur. C’est à travers l’outil de DIGISCORE que c’est possible.

Comment ce baromètre peut-il nous aider à comprendre les difficultés d’un chef d’entreprise face à la digitalisation de son entreprise ? Voici quelques chiffres (merci à Héloïse Leloup de l’AdN) :

Conviction des PME

  • Pourcentage de chef.e.s d’entreprise convaincus du numérique parce qu’ils perçoivent ceci comme une opportunité dans le contexte d’une stratégie globale d’entreprise
  • Pourcentage de chef.e.s d’entreprise non-convaincus du numérique

Niveau de conviction des PME

  • Pourcentage de chef.e.s d'entreprises utilitaristes qui considèrent que la digitalisation est utile, mais généralement pour une transformation partielle
  • Pourcentage de chef.e.s d'entreprise réellement sceptiques qui croient à une mode du digital ; ils soulignent les risques et coûts de la digitalisation
  • Pourcentage de chef.e.s d'entreprises totalement convaincus par la transformation digitale

Les raisons d'une non-transformation digitale

  • Pourcentage de chef.e.s d'entreprise évoquant l’absence d’avantages (inutilité)
  • Pourcentage de chef.e.s d'entreprise évoquant un manque de temps
  • Autres raisons

Il est indéniable que la transformation digitale des PME est un sujet d’importance cruciale dans l’économie actuelle. Cependant, comme le révèle ce graphique selon les stats de l’AdN, de nombreux chef.e.s d’entreprise hésitent encore à franchir le pas. Pourtant, il est essentiel de dépasser les idées préconçues qui entourent cette transformation digitale.

La première barrière identifiée dans l’étude de l’AdN est que 59% des chef.e.s d’entreprise ne voient pas l’utilité de la transformation digitale. Cela pourrait suggérer une lacune de compréhension quant aux avantages qu’elle peut apporter, tels que l’amélioration de l’efficacité opérationnelle, l’expansion des marchés, et l’accroissement de la compétitivité face aux concurrents ayant, eux, pris le pas.

De plus, 31% des chef.e.s d’entreprise affirment ne pas avoir le temps pour cette transformation. Cependant, il est important de souligner que la digitalisation peut, à terme, libérer du temps en automatisant des tâches répétitives et en facilitant l’accès aux données cruciales pour la prise de décision.

Enfin, 10% des chef.e.s d’entreprise ont des raisons diverses pour ne pas se lancer dans la transformation digitale. Cela souligne l’importance de comprendre ces raisons particulières, afin de proposer des solutions adaptées.

Digitaliser, oui, mais en commençant par quoi en fait ?

En pratique, digitaliser une entreprise peut être comparé à faire la thérapie d’une entreprise. Le système de management de la qualité offre un bon canevas pour représenter tout ce que fait une entreprise. On parle d’une approche par les « processus d’entreprise » et on représente ces processus par familles :

  • Les processus de production: ceux qui permettent de réaliser l’objectif social, par exemples fabriquer des châssis et portes, poser des châssis et portes, entretenir et réparer des châssis et portes. Ici, généralement le chef d’entreprise est très intéressé et « intéressable » à ces métiers de base de l’entreprise qu’il a parfois/souvent créée,
  • Les processus de marketing et de vente qui consistent mettre sur le marché les produits ou services, trouver des clients, les fidéliser et développer le volume d’affaires selon des objectifs prédéfinis. L’intérêt du dirigeant d’entreprise est ici variable,
  • Les processus de support qui consistent à soutenir et piloter l’activité de l’entreprise : les processus financiers et administratifs au sens large, les processus de gestion des ressources humaines, les processus de gestion des données (Informatique et digitale), etc. ici aussi, l’intérêt du chef d’entreprise est souvent variable.

Digitaliser l’entreprise consiste à refondre tout ou partie des processus de cette entreprise, en fonction d’objectifs prédéfinis et d’une stratégie globale. C’est justement cette stratégie qui va définir s’il faut d’abord digitaliser les processus de production, pour améliorer la qualité, diminuer les coûts, automatiser ou, a contrario, si c’est la fonction commerciale qui est moins performante et qu’il convient d’améliorer avec de nouveaux outils digitaux.

Parfois, il en va de la survie économique de l’entreprise. Ne pas avoir automatisé/digitalisé/informatisé certaines fonctions peut représenter un handicap considérable qui pourrait mettre en danger le futur de l’entreprise. Ensuite, pour les fonctions et processus de support, digitaliser permet de faire plus avec moins. C’est donc potentiellement une source d’économies. Tout projet peut faire l’objet d’un business case pour prouver à terme les économies versus l’investissement. L’entreprise qui digitalise sera potentiellement plus rentable.

Dans les fonctions commerciales, le marketing et la production, digitaliser peut permettre de faire autrement les choses. Le dirigeant d’entreprise qui exploite au mieux le digital dans ces fonctions pourra toucher de nouveaux marchés, réaliser une production plus précise, plus fine, de meilleure qualité, lui donnant un avantage compétitif.

Projets digitaux : centre de coûts ou de profit ?

Globalement, il faudrait systématiquement voir le digital comme un centre de profit et non un centre de coûts. Notre expérience a montré que ceci est hautement dépendant du chef d’entreprise et de sa maturité numérique. Je me rappelle, dans un atelier de sensibilisation, un chef d’entreprise, avoir évoqué un investissement considérable dans un nouveau cite Internet (20 K€) alors qu’un nouveau projet client B2B généré par le site Internet lui fournissait une marge qui est un multiple de la valeur de son investissement. Tout ceci vient de la valeur perçue du site Internet : un outil qu’il faut bien avoir (parce que les autres en ont un) et qui coûte (beaucoup) de sous. Or, se doter d’un site Internet bien conçu pour répondre aux besoins des prospects, mettant en avant les différenciateurs de son entreprise est un moyen de se générer tout au long de l’année des leads qualifiés pour sa force de vente …

Comment est-ce qu’on opère une transformation digitale ?

En pratique, il ne faut pas prendre le problème par le côté technologique. La technologie est le moyen mais pas la fin. Ceci va déjà rassurer la plupart des chef.e.s d’entreprise.

La fin est business. Ceci présuppose donc une connaissance précise de son organisation, des processus de gestion et à tout le moins une vision stratégique à 5 et 10 ans. A contrario, un chef d’entreprise disant « on a toujours fait comme cela » n’est probablement pas qualifié pour un projet digital[1]. Kodak était le numéro 1 de la photo argentique ; le virage mal négocié du digital lui a été fatal. Sans jouer les Cassandres, il y a de nombreux virages sur le chemin de chacune de nos entreprises.

Il faut donc réfléchir aux processus de gestion qui méritent ou nécessitent le plus d’amélioration. Ensuite, il faut se faire aider pour spécifier les besoins de l’entreprise.  Et challenger ces besoins. Est-ce que ce que l’entreprise définit comme projet est réellement le besoin ou un épiphénomène du besoin ? Un consultant de qualité permet de faire progresser une entreprise dans la définition d’un plan directeur de digitalisation.

[1] On ne parle même pas ici des changements que l’intelligence artificielle va induire …

Sur cette base, il est alors possible de prioriser les objectifs, identifier les gains technologiques, les chiffrer et les planifier. Progressivement, méthodiquement et « pas comme des sauvages ». Enfin, et c’est l’élément le plus important de tous, quand on sait où il faut aller, il faut se préoccuper d’y emmener toute son équipe. Il faut gérer le changement. « On a toujours fait comme cela, pourquoi devrions-nous changer ? » C’est la question pertinente que l’équipe va se poser, parce que changer n’est jamais agréable. Mais ceci, ce sera pour un prochain article.

[1] Enterprise Resource Planning : un outil logiciel centralisé qui permet, de manière exemplative, de gérer son catalogue de produits ou de services, d’avoir des caisses dans ses points de vente, de faire des devis, des factures, des bons de livraisons, des factures et de piloter son entreprise au quotidien

[1] eXtended Markup Language : un langage de programmation à vocation sémantique pour décrire un objet, ici une facture

L'auteur

Christian Janfils, Functional manager & webmarketeer (gérant) The Right MoveChristian Janfils

Functional manager & webmarketeer (gérant)
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Fort de 25 ans d’expérience à l’intersection du conseil business et de la technique, Christian assure la conception et l’opération au quotidien de solutions e-commerce.

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